Domaine des Varenne
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 La communication à sens unique.

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AuteurMessage
Constant Corteis

Constant Corteis


Messages : 1
Date d'inscription : 22/01/2010

La communication à sens unique. Empty
MessageSujet: La communication à sens unique.   La communication à sens unique. Icon_minitimeVen 22 Jan - 1:24

La meilleure façon de débuter le récit de la passionnante anecdote qui va suivre (Humm) me semble être d'ancrer d'emblée le propos dans un contexte marqué par un ennui tellement profond qu'il ferait passer la fosse des Mariannes pour une estafilade au couteau à beurre.
L'infortuné personnage principal de la triste expérience détaillée ci-dessus, auquel nous nous réfèrerons désormais sous le vocable tout de même nettement plus simple de "Constant" faisait donc l'épreuve d'un ennui à vous sécher l'âme comme une noix de cajou grillée (là pour le coup, ça ne veut en gros pas dire grand chose, mais bon, hein).
Il était tout juste arrivé en Languedoc, ayant cédé aux clapotis que glougloutent les sirènes des mélasses familiales, en acceptant de rejoindre une nièce à lui, laquelle souhaitait vraisemblablement le rencontrer pour une obscure raison dont il serait fort malséant de faire un élément de nature à embrouiller subrepticement quoique non sans efficace un propos déjà naturellement surchargé par l'obésité syntaxique d'un auteur dont le principal défaut, il l'avoue, est la tendance à évacuer sa frustration psycho-affective en boursoufflant ses écrits d'inanités aussi inessentielles qu'indigestes.

Bref, il s'ennuyait ferme donc, perdu qu'il était dans un comté rasoir à vous en faire passer une scie-sauteuse pour un coton-tige. Il avait monnayé sa résidence dans le premier bouiboui craignos qu'il avait dégotté, et s'employait désormais activement à tuer le temps en attendant le sommeil, discipline en laquelle son naturel anxieux un brin hyperactif ne l'aidait pas franchement des masses à exceller.
Il se heurta donc tout de go au mur rieur d'un échec méprisant (vous ne pensez pas que j'aurais une belle carte à jouer pour un concours de métaphores pourries ?).
Finissant par en avoir marre de faire les cent pas, il résolut de s'adonner à un exercice plus conforme à distraire un homme normalement constitué, à savoir faire peser magnanimement son embarras sur les épaules compatissantes d'une demoiselle. C'est une forme de partage, au fond, il paraît que le don de soi est une vertu.

Il chercha donc une donzelle à embêter, ce qui n'était a priori pas super évident lorsque l'on est enfermé dans une auberge miteuse. Il fouilla dans ses poches, et dégotta de quoi écrire, don gracieux quoiqu'involontaire de l'évêché de Périgueux duquel il n'avait appris à ne jamais se départir. Le temps de s'installer devant un bout de papier à peu près vierge, et le voilà tout près à faire acte de charité en partageant sa contrariété.
La victime s'imposa d'ailleurs relativement d'elle-même. Constant n'était pas en forme, et allait vraisemblablement gribouiller quelques mots indignes, il était donc plus prudent de choisir une femme facile. Le genre à s'énerver rapidement, quoi.

S'étant résolument gratté la tête durant quelques secondes, il se mit à écrire et rédigea d'un trait.


Citation :
A vous, Eugénie de Varenne,

Salutations.

Je gage que vous saurez comprendre qu'il est des révélations mystiques dont la nature proprement divinatoire légitime certaines transgressions aux règles morales trop vite établies dans les mondes sublunaires.
Si vous doutiez de ce principe, je vous invite résolument, et dans la plus grande solennité, à vous détourner de la lecture de la suite de ce courrier, lequel ne satisferait votre curiosité qu'au prix d'un embarras plus grand.
Il est annoncé dans l'averroïsme oriental que c'est au jour de la créance que Dieu sera suprêmement souverain. Si douteuse que soit l'origine de ce proverbe, je vous confesse le besoin de payer dès à présent les dettes que j'ai envers vous, afin de laver mon âme en préparation à ce jour fatidique.
Il semblerait que les évènements m'aient mis malgré moi en position de vous voler une part de votre intimité. L'idée la plus simple de la réciprocité voudrait que je vous la rende, tout simplement, mais vous entrevoyez immédiatement l'impossibilité de ce retour. Je suis prisonnier de votre étreinte textile, condamné à vie à garder pour moi le souvenir de cet instant, sans jamais devoir vous rendre ce qui ne devrait être connu que de vous. Ainsi donc, j'ai pensé qu'il serait opportun de vous offrir en retour, la simple mais profonde gratitude que j'éprouve envers vous pour m'avoir autorisé à vous connaître ainsi. Et, afin que l'équilibre cosmique soit pleinement réalisé, je joins à cela un simple compliment, qui vous rendra, peut-être, le plaisir que j'ai moi-même eu à vous voir : vous avez de forts charmants jupons.

N'essayez point de répondre, nous risquerions de perturber les comptes du débiteur céleste ! Quoiqu'il arrive, je ne vous donnerai pas d'adresse où adresser votre pli.
Je vous autorise même à douter que cela soit bien moi qui vous écrive, magnanime que je suis.

C. Corteis.


Et le pire, c'est qu'il n'inventait pas.
Soulagé d'avoir pu se remettre en phase avec la réalité ontologique de sa présence au monde par le biais de la pression en puissance exercée sur l'appareil cérébrospinal d'autrui, il s'allongea, satisfait.
La lettre partirait demain. A chaque jour suffit sa peine.

Constant n'était pas passé loin, un peu plus, et il aurait perdu sa journée.
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